Sous le soleil brûlant du sud de l'Espagne, échappant à la rigueur hivernale qui enveloppe le continent en ce début 2025, cette jeune cycliste qui enchaîne les ascensions en compagnie de quelques coéquipières de sa nouvelle équipe dans la région d'Almeria, lieu privilégié des équipes cyclistes pour les stages de début d'année, n'est pas une professionnelle comme les autres.
Fariba Hashimi a fui l'Afghanistan en 2021, au moment du retour du pouvoir des talibans, au-delà de ce retour éclair et subi par la communauté internationale, ce retour marque la fin de tous les droits, même les plus élémentaires attribués aux femmes, interdiction d'aller à l'école, de se maquiller, de sortir seule dans la rue et bien évidemment de faire du sport.
Originaire de Maïmanah, à 700km au nord-ouest de Kaboul en direction du Turkménistan, Fariba découvre le vélo à 14 ans en compagnie de sa sœur aînée Yulduz. C'est cette passion qui a perduré malgré les insultes proférées sur le bord de la route durant les entraînements, les menaces, les jets de pierres, qui a changé la vie de Fariba et de sa sœur.
Alors que les talibans firent chuter les institutions dans la capitale, une ancienne championne du monde de cyclisme italienne parvient à l'exfiltrer en compagnie d'une dizaine d'athlètes locaux avant que l'aéroport de Kaboul ne devienne une zone de chaos. Un exode dur mais inévitable en direction de l'Europe pour continuer à vivre librement de sa passion.
Installée dans un premier temps en Italie avec sa sœur, le réseau de leur protectrice leur permet de signer dans une petite équipe italienne et où elle conquiert le titre de championne d'Afghanistan sur un parcours tracé... en Suisse pour des raisons évidentes, les sœurs Hashimi sont repérées par l'équipe Israël Premier Tech qui leur propose un contrat dans son équipe de développement puis en 2024 les voici dans l'équipe de l'UCI qui regroupe des coureurs issus de pays en voie de développement ou en guerre.
Comme dans un rêve, tout s'accélère durant cette année, la voici porte-drapeau de la délégation afghane aux JO de Paris, où elle devient la 1ère femme afghane à participer aux JO sous la bannière de son pays et non plus sous celle des réfugiés. Un privilège honoré comme il se doit avec 80 km d'échappée sur le bitume parisien.
Une fierté que Fariba Hashimi souhaite transmettre à chaque coup de pédale, pour les 20 millions de femmes afghanes qui étouffent sous le joug taliban qui resserre l'étau des libertés de jour en jour, tandis que la communauté internationale préfère regarder du côté des hydrocarbures russo-ukrainiens ou moyen-orientaux. Ce qui n'est pas sans conséquence pour sa famille restée au pays qui doit régulièrement déménager à cause des menaces de l'autorité talibane, son jeune frère ayant été agressé en 2024, soupçonné par le biais de ses sœurs de transmettre des idéaux occidentaux à la population locale.
2024, l'année où tout bascule avec une 1ère victoire sur le Tour de
l'Ardèche au sommet du Mont Lozère devant des coureuses renommées comme
Wlodarczyk, De Jong ou Squiban. Une 8ème place au général confirme ses
capacités en montagne et la belle marge de progression qui s'offre à elle.
Cerise sur le gâteau de cette grande année, l'équipe Ceratizit, qui évolue en Women World Tour lui fait signer un contrat d'un an, avec en ligne de mire l'espoir de participer aux grandes courses du calendrier dont le Tour de France.
Fariba continue de tracer son sillon avec talent dans le peloton mondial avec la volonté farouche de porter la voix des femmes afghanes, un combat beaucoup plus ardu que de grimper les vingt et un lacets de l'Alpe d'Huez. Chaque coup de pédale pour faire passer ce message, celui de ne pas oublier toutes ces femmes en Afghanistan, en Iran ou ailleurs qui souffrent, opprimées, bâillonnées, violentées par des organisations fanatiques, des régimes autoritaires, patriarcaux et surtout misérables.